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Comment taire?
28 juin 2008

Deleuze

La semaine dernière j'ai lu critique et clinique de Gilles Deleuze, qui est un des derniers grand philosophe français, acteur de l'école de Vincennes dans les années 1960, critique des logiques capitalistes et psychanalitiques entre autres.

Ce recueil d'essais traite d'écrivains et un peu de philosophes. Son thème ce sont les jeux du langage et il s'appuie sur la phrase de Proust selon laquelle « les beaux livres sont écrits dans une sorte de langue étrangère ». Cela veut dire que les écrivains inventent une langue dans la langue commune, ils se l'approprient, la défont, la reforme, en font quelque chose de propre et de neuf. Il nous parle de Carroll, Beckett, Kant, Nietszche, Lawrence, Masoch, Whitman, Melville, Platon, Spinoza.

À propos de Melville, il analyse la nouvelle Bartleby. Un jour, le héros, un commis de bureau qui passe des années à recopier des documents – donc à travailler sur des mots -, à un ordre de son supérieur, répond: « je préfère ne pas – I prefer not to » et dès lors il ne fera plus rien et répétera inlassablement la même objection jusqu'à finir on s'imagine où. On remarquera que cette formule est correcte du point de vue de la syntaxe, que portant elle n'est ni affirmative ni négative, est qu'elle est indéterminée. Bartleby, ou le révolté du langage.

Lorsque j'étais en deuxième année à la Sorbonne, le prof qui m'a le plus marqué était une sorte de post-soixante-huitard dont le prétexte était le criticisme kantien mais qui passait les trois quarts de son cours à divaguer sur les philosophes et les artistes qui lui plaisaient. Il nous disait souvent: « servez-vous du système pour arriver à vos fins » - Ah si je l'avais écouté! - Pour lui, le monde se divisait en deux catégories: les penseurs critiques et les penseurs de système. À l'époque, j'avais trouvé le premier philosophe en live de ma vie. D'ailleurs, ses cours étaient pleins tout au long de l'année. Ce qui est amusant, c'est que à chaque fois que je lis Deleuze, je retrouve ce formidable professeur. Ce que j'aime bien aussi, c'est que les auteurs qui me marquent, me donnent envie de découvrir les auteurs qu'ils aiment. Le soixante-huitard m'a donné envie de découvrir Bonnard, Deleuze me donne envie de lire Melville, récemment Kierkegaard m'a donné envie d'écouter le don juan de Mozart. Il se crée une affinité de goûts, comme lorsque un ami te recommande le dernier film qui lui a plu. C'est motivant.


        Alors d'abord il y eu un petit garçon. Quelques jours après être sorti de son œuf, il se mit debout et découvrit qu'il pouvait marcher. Pardonnez-lui, il en fut fier. Tout sourire, il fit aussitôt usage de sa découverte. Il marcha. Il sortit de sa forêt, sans oublier de donner des coups de pieds aux derrières des arbres. Il traversa un désert, qui donna à sa peau une couleur plus décente, et une vaste prairie, où il partit d'un éclat de rire qui dura jusqu'au matin suivant. Après sept jours il avait tant marché qu'il était devenu sage. Puis ses jambes s'arrêtèrent. Vous voulez peut-être savoir pourquoi ? Eh bien il était arrivé à la fin de la terre. Devant lui il n'y avait plus que du ciel, avec quelques nuages, pour faire plus joli. Il était là, immobile, et regardait. Sa respiration était profonde, ses poings étaient serrés. Et tout à coup, ses yeux brillèrent avec malice. Alors il avança un pied, ouvrit les bras, fit basculer le poids de son corps vers avant, et s'élança. Et c'est ainsi que ces animaux qu'on appelle les hommes sont devenus des oiseaux.

        Mais l'œuf n'avait pas dit son dernier mot. Au fond de la coquille, qui était restée là, gisante, un peu penchée en arrière, remuait une chose informe. Ça n'avait pas vraiment de couleur et c'était plus obscur que la plus sombre des ombres. Trois bulles éclatèrent désagréablement et le deuxième garçon sortit. Sa peau fut grise, ses ongles violets, ses cheveux blancs. Son regard était le mal, et croiser leur trajectoire vous aurait condamné à des cauchemars pour le restant de vos nuits. Très vite, il avait reniflé la joie que l'autre avait laissée derrière lui, et il était parti d'un grincement de gorge macabre et barbare. Il brûla impunément la forêt, et il s'élança à la suite de son frère. La pauvre devint poussière et ne comprit même pas. Bon, il laissa quand même le désert tranquille, mais la prairie ne survécut pas non plus à son passage décidé. Quand il arriva à la fin de la terre, celle-ci n'était plus que feu et douleur. Il leva les yeux d'un autre monde sur un enfant qui volait au loin. Celui-ci le reconnut, et poussa un cri affreux de désespoir.

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Commentaires
L
un peu trop longs tes ttrucs!!!
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